Développement des ministères laïques dans les églises locales

Quand un grand théologien trop tôt disparu nous éclaire!

Il convient tout de même de s'interroger sur les raisons qui peuvent expliquer ce décalage entre, d'un côté, un développement dans la pratique et, de l'autre, une frilosité extrême à définir un statut théologique stable. On peut avancer deux explications. La première est la peur qu'un statut réel donné aux ministères laïques ne vienne affaiblir l'identité du ministère presbytéral et aggraver la crise de recrutement qui existe depuis longtemps déjà. On verra ici les raisons des réticences par rapport à l'accès des femmes au ministère de diacre, de lecteur et d'acolyte. Elles sont apparues clairement au synode romain de 1987 relatif à la vocation des laïcs. Le secrétaire spécial de ce septième synode ordinaire des évêques, le défunt cardinal Pierre Eyt, écrivait à ce propos : « La question fut fréquemment exprimée de réserver le terme de ministère au ''ministère ordonné ou sacramentel'' ou encore ''lié à l'imposition des mains'' (épiscopat, presbytérat, diaconat). » La deuxième explication tient au fait que la question des responsabilités et des ministères confiés aux laïcs est souvent abordée à partir de la situation d'urgence du service des paroisses qui n'ont plus de prêtres, c'est à dire dans une perspective de survie de communautés dont l'avenir paraît plus que problématique. Ce souci est plus que légitime, il est vital, mais si la question des ministères laïcs se pose uniquement dans ce contexte, nous n'arriverons jamais à sortir du modèle presbytéral. Nous tomberons dans ce que beaucoup appellent la logique de substitution et nous n'arriverons pas à une logique de pluriministérialité fondée sur le Nouveau Testament : « De même qu'en un seul corps nous avons plusieurs membres et que tous les membres n'ont pas tous la même fonction, ainsi, à plusieurs, nous sommes un seul corps dans le Christ, étant chacun pour sa part, membres les uns des autres » (Rm 12,4-5).

Il est indéniable que cette image du corps venue de la tradition la plus ancienne de l'Eglise travaille à la fois la réflexion magistérielle et la vie plus spontanée des communautés chrétiennes. Les difficultés existent, les résistances ne doivent pas être sous-estimées, mais des voies commencent à se dessiner. Il nous faut donc encore réfléchir à nouveaux frais pour baliser le chemin et avancer dans une dynamique positive, qui soit une dynamique d'espérance.

Laurent Villemin in l'Eglise à la rencontre de l'autre